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Pierrot dit "Le Gilles"
© C2RMF.T. Clot

Pierrot dit le Gilles, Jean-Antoine WATTEAU (1684-1721), Musée du Louvre. Un déploiement inédit

Publié le 24/09/2024

La restauration s’est inscrite dans le cadre de l’exposition « Revoir Watteau » au musée du Louvre (16 octobre 2024 - 3 février 2025). L’œuvre est entrée au C2RMF en juin 2022 pour compléter l’imagerie scientifique de 2009, suivi de sa restauration de septembre 2022 à septembre 2024, dans les ateliers restauration peinture du site de Flore.

HISTORIQUE DE L’ŒUVRE 

Le tableau entre en 1869 dans les collections du musée du Louvre grâce au legs du Dr. Louis La Caze. On ne connait pas la destinée première de ce grand format non daté. Il figure en 1826 dans le descriptif du cabinet de feu Mr le Baron Vivant Denon premier propriétaire identifié du Pierrot.

HISTOIRE MATERIELLE

Les archives de restauration nous renseignent dès 1896 sur des interventions minimales. En 1952 l’accord est donné par la Commission de restauration pour un « allègement de vernis », celle-ci va être réalisée par le restaurateur Jean-Gabriel Goulinat. 

Le support de l’œuvre est une toile (H.1,844 m ; L.1,493 m), qui a été doublée à la colle lors d’un rentoilage probablement daté de la fin du XVIIIe siècle ; l’ensemble a été tendu sur un châssis à écharpes avec croix centrale. Au cours de ce rentoilage, la toile a été coupée, le format de l’œuvre a été diminué laissant  sur les quatre bords repliés de la toile des restes de peinture originale. Ces restes ne déterminent pas pour autant les dimensions d’origine mais il est probable que Watteau ait peint le personnage du Pierrot au centre de la composition dans un décor plus vaste.
 

Ensemble face et revers après restauration © ©C2RMF.T. Clot

La toile est enduite par une double préparation : une première de couleur brun-rouge recouverte d’une seconde plus rosée contenant du blanc de plomb. La reflectographie dans l’infra-rouge et la radiographie montrent une élaboration complexe et des reprises du peintre particulièrement dans le ciel et la figure de Crispin. Les pigments sont ceux généralement utilisés par Watteau avec cependant quelques spécificités : le rouge est un ocre rouge et non du vermillon et le bleu du ciel est un bleu indigo qui avec le temps, s’est en partie décoloré. 

INTERVENTION DE RESTAURATION

Avant restauration, malgré l’ancienneté du rentoilage, la toile ne présentait pas de déformation et l’adhérence des matériaux était satisfaisante. Une intervention a cependant été menée sur le support afin de rendre visible les bords latéraux encore en bon état de conservation. Pour s’adapter au nouveau format (H.1,844 m ; L.1,557 m), le châssis du rentoilage précédent a été aménagé et non remplacé.

Ensemble face, réflectographie infrarouge, bords latéraux dépliés et radiographie, bords latéraux dépliés © ©C2RMF, N. Le Guern et ©C2RMF, L. Clivet

La couche picturale était recouverte d’un vernis irrégulier et jaune et de nombreux repeints désaccordés masquaient quelques lacunes, des usures, la décoloration dans le ciel et des réseaux de craquelures prématurées particulièrement sur la figure de Crispin. L’intervention sur la couche picturale s’est déroulée en deux étapes, une comprenant le retrait des vernis et des repeints, la deuxième comprenant le vernissage et la réintégration. Après la première étape, l’écart entre les parties altérées et celles en bon état est apparu plus nettement. La deuxième étape a donc cherché à rétablir l’équilibre tonal de l’ensemble et à intégrer au mieux les bords dépliés ; ce travail délicat a été mené avec l’attention constante des conservateurs et du C2RMF. 

Après restauration, l’ensemble de la peinture est apparu dans une belle harmonie de tons clairs appliqués en touches vives transparentes ou en relief. Si l’histoire matérielle de cette œuvre garde des énigmes quant aux dimensions d’origine et aux reprises du peintre, l’actuelle restauration en dépliant les bords latéraux, en retirant les vernis et les repeints altérés et en équilibrant l’ensemble, renouvelle sa lecture et la replace avec plus de pertinence dans son contexte de création. 
 

Détail après retrait des vernis et des repeints et détail après restauration © C2RMF.T. Clot
Paul Gauguin, Le Cheval blanc (Paris, musée d'Orsay), imagerie scientifique
© C2RMF/Jean-Louis Bellec et Thomas Clot
Illustration page CANOPEE
© C2RMF
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© @C2RMF Antoine Merlet